Livres et pédagogie

Le confinement vu par les enfants : un travail donné par une professeur d'anglais

« J'ai écrit ce journal pour me rappeler, plus tard, ce que j'ai fait durant le confinement »  a écrit Jessica, dans la langue de Shakespeare, au début du journal de bord demandé par Fatiha Pollet, professeur d'anglais au collège Paul Cézanne de Brignoles.

« J'ai tenu à ce que les élèves écrivent en anglais leur ressenti pendant ce confinement, explique-t-elle. Ce n'était pas un travail très scolaire et beaucoup d'élèves moyens ou en difficulté se sont pris au jeu, ce qui m'a conforté dans le choix de ce travail. Je sais que les élèves se sont aidés de Google traduction, mais ce n'est pas le plus important, je sens qu'ils se sont impliqués ». L'enseignante a eu la joie d'avoir de beaux travaux, avec des photos, des dessins, sur du papier vieilli ou dans de petits carnets. Les élèves ont pris plaisir à illustrer et mettre en valeur leur quotidien.

Qu'ont fait les élèves pendant ce confinement ? Du sport. Ils ont organisé des parties de ping pong ou de volley ball en famille, « parce que nous étions quatre », précise Lucas. Ils ont aussi fait du dessin, lassés de jouer "à la play", comme ils disent [à la playstation NDLR]. Ils ont cuisiné des pancakes, des tiramisus : « J'ai été fière de mes plats » raconte Solène. Ils se sont lancés dans le visionnage de séries en anglais, « afin de regarder les derniers épisodes sortis, avant qu'ils soient diffusés en français », se réjouit leur professeur.

Les devoirs occupaient aussi une bonne partie de leur temps. Certains ont découvert leur sœur ou leur frère, à l'université, qui les a aidés pour les faire. « Ce confinement leur a permis de se découvrir des talents, des capacités, raconte leur enseignante. Ils étaient fiers de leurs réalisations, et heureux de partager des jeux et des expériences en famille ». Cela a été une période qu'ils n'oublieront jamais. Elle leur avait aussi demandé d'utiliser le futur pour dire la première chose qu'ils aimeraient faire au sortir du confinement. La réponse a été assez étonnante : voir leurs grands-parents et leurs amis, et faire « une balade en forêt ». Comme quoi les goûts ont changé. Et la vie d'après.

La Béraude


Mais qu'apprennent nos enfants à l'école ?

Pour y répondre, nous avons expérimenté le programme pour vous. Nous avons, nous autres, parents, au cours de ces deux mois de confinement, levé le voile sur ce mystère.

Bien entendu, nous savions bien que nos enfants faisaient essentiellement des mathématiques et du français du CP au CM2. Mais nous n'en connaissions pas toutes les arcanes.

Donc, ce qui nous a été demandé, notre enfant ne pouvant plus avoir accès à son école, a été de nous transformer en professeur des écoles, ou en professeur du secondaire. Et ceci, au risque toujours très grand de creuser chaque jour un peu plus l'inégalité entre les enfants qui pouvaient être aidés, et ceux dont les parents, soit par le temps passé à leur travail ou à leur télétravail, soit par manque de formation, ne pouvaient pas assurer ce suivi.

Nous sommes donc devenus les enseignants de nos enfants. Il ne s'agissait pas de révisions, mais bien de leur apprendre de nouvelles notions, en français, en mathématiques, en anglais...

L'usage des vidéos sur internet a été très novateur, et très développé - ce qui est, à mon sens, une bonne chose - avec des enseignants qui renvoyaient directement les enfants sur des C'est pas sorcier ou, en anglais, par exemple, sur des dessins animés éducatifs, pour apprendre le nom des animaux. Ce grand boom des vidéos aurait pu, à mon avis, être encore plus important, si le programme du primaire avait comporté, notamment, davantage de géographie. Or, qu'ont vu nos enfants dans ce dernier domaine pendant ces deux mois en CM1 ? Quels fichiers nous ont été envoyés ? La France ? Les continents ? Les capitales ? L'Europe ? Non. Devinez : Internet, ses possibilités et la fracture numérique dans le monde. A la rigueur, il s'agissait d'un programme de technologie, mais pas de géographie... Qu'on ne s'étonne plus s'ils ne peuvent plus situer l'Amérique et l'Afrique en 5è, ou pire, en 3è.

En ce qui concerne l'Amérique, en effet, j'ai eu la stupeur de me rendre compte, pendant ces deux mois, que ma fille de 5è ne savait pas où la placer... Au secours ! Mais qu'avons-nous enseigné à nos enfants, nous autres parents, et eux, enseignants, pendant 13 ans, pour qu'ils ne sachent pas situer les continents sur une carte en 5è !? Alors j'ai ressorti le globe terrestre, la mappemonde... Ce qui nous a été très utile pour les leçons sur les grands explorateurs. Une leçon très "light" d'ailleurs, où les explorateurs avaient "l'intention" de christianiser les peuplades autochtones... bel euphémisme pour un massacre organisé.

Bref, comment peut-on encore faire confiance à l'école ? J'avoue que, en ce qui me concerne, comparé à ces domaines d'importance que sont l'histoire et la géographie, la différence entre un COD et un COI pendant une classe virtuelle (4 ou 5 élèves de CM1 en visioconférence avec leur enseignante pendant une heure sur une tablette) me paraît prendre une place prodigieusement importante, bien que ces points de grammaire bien évidemment, méritent de ne pas être oubliés. Mais comment faire encore confiance à notre école, avec des élèves de plus en plus ignorants du monde qui les entoure ? Quels citoyens produisons-nous ? La discrimination, là encore, est présente. J'ai un globe terrestre et une mappemonde. J'ai la possibilité d'aider mes enfants. Ce simulacre d'école peut bien se remettre en question. La fracture numérique dans le monde, étudiée par ma fille en CM1, commence par la fracture numérique en France. En effet, sur l'ensemble des élèves, combien de parents possédent à la fois un ordinateur avec une connexion internet, une photocopieuse scan, et beaucoup d'argent pour le papier et les cartouches ? D'ailleurs, avec ce travail à la maison, les cartouches de 302 sont en rupture de stock. Pour l'instant, à deux jours de reprendre, ce sont nos cerveaux qui sont en rupture de stock. Nous devions, au départ, remplacer les enseignants pour deux mois, eh bien, nous savons aujourd'hui qu'avec la reprise des cours, il va falloir continuer à le faire.

Être professeur documentaliste aujourd'hui, c'est gérer deux espaces : l'un réel, les lieux mêmes de la bibliothèque, appelé CDI, centre de documentation et d'information, et l'autre virtuel, l'espace numérique des connaissances, matérialisé par la présence physique des ordinateurs.

La Béraude


Être professeur documentaliste aujourd'hui en collège,
Des sciences de l'information à l'élève. Pratiques originales.

Gérer un espace hybride

Être professeur documentaliste aujourd'hui, c'est gérer deux espaces : l'un réel, les lieux mêmes de la bibliothèque, appelé CDI, centre de documentation et d'information, et l'autre virtuel, l'espace numérique des connaissances, matérialisé par la présence physique des ordinateurs.

Être professeur documentaliste - et non la « dame du CDI », c'est s'investir dans une mission plus vaste : éduquer les élèves et les rendre autonomes face à ce qui paraît le plus évident pour ces « natifs du numérique » (ceux qui sont nés à l'ère de l'ordinateur), à savoir l'accès à l'information via le numérique. Combien croient, en effet, tout trouver facilement sur internet, et se perdent en fait dans des sites inappropriés, inadaptés car trop difficiles d'accès ou trop limités ? Rendre l'élève autonome par rapport à l'information, « l'éduquer à l'information », est une des missions du professeur documentaliste. Il s'agit tout d'abord de lui apprendre à faire le tri dans les sources, l'inciter à créer des sitographies pour conserver la trace de ses informations, l'aider à trouver les mots clés, à prélever les informations essentielles, puis l'inciter à faire une synthèse personnelle, loin du copier-coller, dont il ne garderait aucun réel souvenir. La reformulation est essentielle, et peu réussissent de prime abord cette opération sans un certain apprentissage.

Mais cela prend du temps, un temps dont manquent souvent les enseignants venus chercher au CDI un support papier en complément des recherches numériques qu'ils auraient pu faire uniquement en salle informatique, venus chercher aussi la collaboration et le savoir-de la professeur documentaliste.

Un fonds savamment choisi

Mais revenons aux livres...

La constitution d'un fonds (ouvrages papier), reste du ressort exclusif de la professeur documentaliste, qui a toute latitude dans le choix des ouvrages. Elle constituera le fonds d'abord en fonction des besoins de l'établissement, des différentes matières et des projets en cours dans l'année. Le foyer socio-éducatif peut également avoir ses propres besoins, ainsi que les clubs. Dans un CDI, on doit trouver tout d'abord les classiques, puis les essentiels documentaires dans de nombreux domaines de la connaissance : de la géographie - avec les atlas, à l'astronomie, des animaux aux volcans, des livres sur la musique et des livres d'art... Une fois ce fonds constitué, viendra le temps du livre plaisir, avec de nombreux auteurs pour la jeunesse, et enfin, celui du livre loisir.

Un espace différent

C'est à ce stade qu'est arrivée Florence Michet, professeur documentaliste au collège Paul Cézanne de Brignoles depuis 17 ans. Cette pérennité lui permet d'enrichir à présent son fonds de livres créatifs. Grâce à son club d'origami, elle peut mettre à la disposition des élèves des livres pour en réaliser. Mme Michet nous apprend que le petit plus éducatif de l'origami, c'est qu'il est impossible d'en réaliser sans suivre correctement les consignes. Or, que ne cessent de regretter les enseignants, toutes matières confondues, si ce n'est que les élèves ne lisent pas correctement les consignes ? Le souci pédagogique anime donc toujours Florence Michet.

Par ailleurs, toujours soucieuse de rendre ce lieu attractif, elle a créé un espace dédié à la détente : la « bulle ». Dans cette salle ouvrant sur le CDI, les élèves peuvent trouver des jeux d'énigmes, l'énigme de la semaine, des mandalas, des albums, des canapés... et, depuis cette année, des tablettes éducatives.

Les clubs du midi se sont diversifiés également, avec un ciné-club deux fois par semaine, où les élèves peuvent se faire une culture en visionnant les classiques : le Corniaud, Au revoir les enfants, Les misérables, le Mur de l'Atlantique...

Cette année, la nouveauté, c'est également un club de création d'escape games, jeux papier ou numériques très appréciés par les élèves, où ils doivent construire leur univers sur un mode proche du travail de l'écrivain, avec briefing collectif, choix de personnages et de l'intrigue, jusqu'à la réalisation finale en version imprimée.

Découvrir le monde et partir vers d'autres horizons

Florence Michet rappelle que dans ce lieu hybride, livres et sites n'ont en fait qu'une même mission : apporter à l'élève une meilleure connaissance du monde réel, et qu'au-delà d'être un centre d'information et de documentation, le CDI est aussi un lieu d'échanges, un tremplin, notamment, pour la fréquentation des médiathèques par l'élève une fois devenu adulte. Leur proposer des supports pédagogiques est certes le rôle du professeur documentaliste, devenu un être « hybride », polyvalent, mais il sait qu'il n'a pas seulement en face de lui des élèves, mais des personnes, enfants ou jeunes adultes, en recherche d'un espace où se sentir bien, d'un lieu au sein de l'école qui soit aussi dédié à la création et à la curiosité, et où ils pourront être dans le divertissement au sens noble, dans le plaisir du partage et la découverte.

Séverine Béraud


Devoirs maison. Aide aux devoirs. Bilan.

Le coup de gueule de SB.

« Viens faire tes devoirs ! - Non, je n'ai pas envie ! », « Va faire tes devoirs. - Non, je n'ai pas envie ».Dans ces quatre phrases, en apparence identiques, un mot change cependant. « Viens » signifie que le parent va être aidant, « Va » signifie que l'enfant sera mis en autonomie. Ce positionnement peut être volontaire ou subi.

L’éducation Nationale met au service des élèves, depuis l'année dernière, un dispositif « Devoirs faits » où ils sont pris en charge par des enseignants pour les aider à acquérir une certaine autonomie, à comprendre des consignes obscures, à apprendre leurs leçons, à lever le voile de l'incompréhension, parfois, du vocabulaire.

Mais que faire lorsqu'un élève de 6è vous regarde lui apprendre le verbe TO BE au présent en anglais, et vous avoue, en tremblant : « Mais je ne le connais pas non plus en français... »

Que faire lorsque cet élève de 3è, qui vous regardait de haut en début d'heure, se soumet dans la découverte de son incompétence ? Antisémitisme pour lui ne veut rien dire, il n'a jamais entendu parler de communisme, il situe la seconde guerre mondiale – le cours qu'il doit apprendre, en 1980. Pire, comment lui expliquer, sans le blesser, que son arrière grand-père a peut-être fait la guerre « pour nous » lorsque l'on lit : « la mobilisation des colonies », quand, pour lui, la colonie est un « groupement » comme une colonie de cloportes ou de fourmis ? Il ne comprend pas le sigle GB, qui est l'un des belligérants (qu'est-ce que c'est?), mais pas non plus Grande Bretagne, et il ne situe même pas l'Angleterre, lorsque je lui indique pour l'aider qu'elle se trouve « après la Manche ». Car, bien entendu, qu'est-ce que la Manche ?

Tout d'abord, il y a un manque criant de prérequis, et la connaissance en spirale montre bien ici ses limites. Jusqu'où remonter pour lui faire comprendre ce cours, même en conversation individuelle, les autres élèves étant pris en charge par d'autres professeurs dans la salle ?

Et comment ne pas oublier l'empressement de cet élève qui ne connaissait pas le verbe être en français à se saisir de ces papiers de révision que vous avez écrits juste pour lui, souvenir précieux de cette heure où il a enfin été pris en compte dans son individualité, sans être grondé de « ne pas savoir » ? Quelle autre attitude que des larmes au cœur, en comprenant soudain la torture de ses heures à ne pas comprendre et à se faire reprocher son agitation ?

Et combien de temps ai-je mis à apprendre à d'autres le verbe TO BE au présent alors qu'ils semblaient le savoir ? Une heure pour des élèves d'un niveau moyen. Combien de temps un enseignant pense-t-il qu'un élève va passer à apprendre son cours à la maison ? Et que font les enfants seuls face à ces mots mal tracés de leur main malhabiles ou fautives sur leur cahier, et qu'ils ne comprennent pas ?

Je ne peux pas m'empêcher de considérer comme excessif, avec les années d'enseignement et d'aide aux devoirs diverses, en temps que parent d'élève de primaire et de collège également, le temps qu'il faut pour arriver à une « bonne » note. Mais surtout, je suis bouleversée d'entendre la sanction de la solitude prononcée par le professeur : « Tu n'as pas fait ton travail à la maison. » Pourtant, je voudrais leur dire : mais que comprennent certaines familles au « radical », ou à l'abside ?

« Va faire ton travail ! » Et l'enfant reste face au néant. Il ne comprend ni la consigne, ni son cours. Il viendra demain en noter la suite sans en avoir compris le début. Certaines matières sont plus gravement concernées, celles dites « en escargot » ou en spirale. L'anglais, l'Histoire- géographie. Parce qu'en français, un texte en chasse un autre, une leçon ne se construit pas toujours sur la fondation de la première, ne fait pas toujours appel aux prérequis.

Je ne supporte plus la discrimination que l'école de la République ne cesse d'entretenir avec les devoirs à la maison. Quand se décidera-t-on à apprendre en classe ? Pourquoi pour être parentfaut-il être capable de connaître les cours de son enfant mieux que lui-même ? Et combien de familles se déchirent à cause des devoirs, parce qu'il faut les prendre sur leur temps ensemble, avec des inégalités lorsque les parents exercent des métiers chronophages, ou parce que leur propre incompétence les rend irritables face à l'incompréhension de leur enfant, parce qu'ils n'ont pas la « pédagogie adaptée à la matière » qui pourrait les aider ?

Devoirs faits ne suffit pas. Le parent est sanctionné aussi bien que l'enfant.

L'école de la République est l'école de la discrimination. Il est un cours très prisé en français, en quatrième : la littérature engagée. Si ma littérature pouvait le devenir, porter ses fruits, dessiller un peu les yeux de certains, trop prompts à juger un enfant sur ses devoirs maison ou son niveau, je serais contente. Sans compter la fracture numérique qui se rajoute, ceux qui ont l'ordinateur pour aller sur Pronote, et ceux qui ne l'ont pas.

Soyez un peu plus indulgent, je vous en conjure. Voilà mon engagement. L'égalité des chances commence par une prise en charge du cours par le professeur, et non par le parent.

SB


L'école des incapables ? La maternelle, un apprentissage de la domination

L'école des incapables ? La maternelle, un apprentissage de la domination
Couverture du livre

Editions La Dispute - collection L'enjeu scolaire
Mathias Millet, Jean-Claude Croizet
Recension de Joanie Cayouette-Remblière - Sociologue, chercheuse à l’INED.

1 - L’ouvrage de Millet et Croizet mérite de faire date en sociologie de l’éducation, tant il rend compte de la manière dont, au sein des classes, les "pédagogies invisibles" 1 , les "catégories de l’entendement professoral" 2 , les contraintes structurelles et pédagogiques, la "forme scolaire" 3 , l’injonction à l’autonomie 4 , la psychologisation des difficultés scolaires 5 ou encore les inégalités sociales de conditions d’existence des élèves s’articulent pour reproduire et légitimer les inégalités sociales, et ce dès l’école maternelle. En cela, ce livre se présente à la fois comme le compte rendu d’une enquête de terrain et comme l’actualisation, par l’empirie, des théories de Bourdieu et Passeron enrichies de plusieurs décennies de recherches.

2 - L’ouvrage s’appuie sur un double dispositif méthodologique qui renvoie aux appartenances disciplinaires différentes des deux auteurs, Mathias Millet étant sociologue, et Jean-Claude Croizet psychologue. On retrouve donc d’un côté l’exploitation d’une enquête par observations in situ dans dix classes situées dans sept écoles maternelles et par entretiens approfondis avec les enseignants de ces classes ; et de l’autre, les résultats de plusieurs expérimentations "en milieu naturel" (au sein des classes), réalisées auprès de 1400 élèves du primaire et du secondaire. En s’appuyant principalement sur l’étude des écoles maternelles, les auteurs mobilisent l’"antériorité socialisatrice" (p. 25) de ces classes par rapport au parcours scolaire pour étudier :

  1. les conceptions « naïves » de l’apprentissage et de la difficulté, c’est-à-dire les représentations qui gouvernent les pratiques au quotidien sans pour autant être théorisées,
  2. leurs origines sociales et institutionnelles,
  3. leurs effets notamment sur les performances des élèves.

Ce que montrent les récits d’observation et les analyses des auteurs, c’est que l’évaluation est permanente en maternelle, qu’elle dépasse très largement la question de la "mesure" (des notes) et qu’elle détourne de l’apprentissage. Ce faisant, Millet et Croizet rendent compte de la façon dont la grille de lecture scolaire parvient à s’imposer comme mode d’appréhension de soi et des conséquences délétères de ce mouvement pour les milieux populaires.

3 - Le premier chapitre s’attache à comprendre les modes de transmission des savoirs en maternelle et leurs effets sur les façons de penser les "réussites" et les "difficultés" scolaires des élèves de trois à cinq ans. Millet et Croizet rappellent la place qu’y prennent les "pédagogies invisibles", à savoir les modes d’apprentissage au cours desquels l’école en vient à dissimuler l’objet de savoir et à réduire son "cadrage" afin de se rendre plus attrayante 6. Par exemple, l’école maternelle tend à importer dans son espace des éléments de la vie courante ("retours sur expériences", jeux...) avec lesquels les élèves sont inégalement familiers, mais qui tout à la fois gomment le processus d’apprentissage et stigmatisent la difficulté. Or, pour les auteurs, ces pédagogies ne se contentent pas d’invisibiliser le processus d’apprentissage pour l’élève, mais, du fait des conceptions pédagogiques suivant lesquelles le jeune enfant est supposé apprendre de façon spontanée et naturelle, le processus d’apprentissage devient également invisible aux enseignants eux-mêmes. On comprend dès lors que les jeux, exercices et prises de parole réalisés par les élèves ne sont pas considérés comme partie prenante d’un processus d’apprentissage, mais qu’ils sont constamment évalués et que l’attention des enseignants se centre sur la révélation de la valeur intrinsèque de l’élève, en termes de capacités et/ou en termes motivationnels. Ces conceptions de l’apprentissage détournent donc les enseignants de la relation pédagogique vers une lecture clinique des conduites scolaires. Les auteurs décrivent alors une école qui juge plus qu’elle n’apprend, qui cherche d’abord à détecter les facilités, les capacités ou les difficultés cognitives plutôt qu’à transmettre progressivement et à tous des apprentissages. Autrement dit, l’apprentissage est ignoré ou oublié en tant que tel (les auteurs parlent d’"amnésie"), d’où découlent une naturalisation des savoirs mobilisés et l’illusion que les compétences que certains élèves mobilisent pour réussir leur sont intrinsèques. Les difficultés peuvent alors conduire à des "réprobations" (feuilles chiffonnées, remarques sèches, élèves privés de récréation...), finement décrites grâce aux observations in situ. Ce chapitre présente également ce que cette stigmatisation des difficultés doit au mode d’enseignement scolaire par classe : par exemple, les récits d’observations montrent bien comment on passe de l’impossibilité pratique pour l’enseignant à répondre aux (sur- )sollicitations de tous leurs élèves à une explication de la difficulté de l’élève qui passe par ses incapacités ou son manque de motivation.

4 - Le chapitre II approfondit l’étude de la naturalisation des aptitudes scolaires à laquelle s’attelle l’école. S’appuyant sur les discours que les enseignants tiennent sur leurs élèves en entretien, les auteurs montrent que ceux-ci sont plus souvent qualifiés du point de vue de leur personnalité que du point de vue de leur relation d’apprentissage. Si elle renvoie aux catégories de l’entendement professoral décrites plus haut ainsi qu’aux transformations de l’ethos professionnel des enseignants de maternelle qui se vivent davantage comme des spécialistes de l’enfant que comme des "maîtres", cette naturalisation des verdicts scolaires s’inscrit dans un processus social qui dépasse l’école et est liée à la construction contemporaine de l’idée d’individu ayant une vie intérieure 7.
Elle n’en permet pas moins d’exonérer l’école de toute responsabilité dans les difficultés scolaires des élèves, dès lors perçues comme extérieures aux situations d’apprentissage.

5 - Le chapitre III montre l’appropriation par les élèves des verdicts scolaires dont ils font l’objet : en termes bourdieusiens, nous pourrions dire qu’il décrit comment l’institution scolaire légitime les inégalités scolaires. Reprenant Pierre Bourdieu 8 et dans la lignée des travaux antérieurs de Croizet 9 , les auteurs parlent à leur tour de "racisme de l’intelligence". Bourdieu écrivait que tout racisme est un essentialisme qui fait passer pour une propriété personnelle ce qui est en réalité un produit relationnel. Cette grille de lecture en vient à statuer sur la nature des êtres et non sur la structure relationnelle des propriétés que ces derniers doivent à leur position sociale dans le monde. Les deux auteurs insistent sur le fait que ce racisme existe sans racistes ou du moins sans intention. Ils montrent que les schèmes de pensée des enseignants sont le produit des modes de fonctionnement institutionnel. En ce sens, la classe est "l’une des matrices les plus puissantes de la pensée scolaire" (p. 137) : elle nécessite que les élèves avancent à la même vitesse, afin que leurs activités soient simultanées. Elle implique alors une "norme chronométrique" qui fait de la vitesse d’apprentissage un indice de l’intelligence ou de la motivation de l’élève, contrairement à ce que montre aujourd’hui la psychologie qui insiste sur le processus d’apprentissage et l’importance d’un temps d’exposition. Pour rendre compte de la portée de ces propos, il faut intégrer la question des inégalités sociales : en entrant à l’école, les enfants de trois ans ont été inégalement exposés, suivant leur milieu social, à ce qui constitue les "pré-savoirs" sur lesquels s’appuient (inconsciemment) leurs enseignants. Certains auraient donc besoin d’un temps d’exposition plus long que d’autres pour s’approprier des compétences et des connaissances. Par exemple, ils maîtrisent inégalement la prise de parole en groupe et ont des expériences inégalement "intéressantes" à raconter (du point de vue de l’enseignant). Or, plutôt que d’être perçu comme un apprentissage et de laisser les uns et les autres l’acquérir dans des temps inégaux, le degré de participation devient une évaluation des compétences scolaires. Les enseignants agissent comme s’ils cherchaient, derrière cette participation, à déceler un potentiel plutôt qu’à enseigner. Des élèves sont ainsi régulièrement disqualifiés dans leurs prises de parole, et les scènes racontées par les auteurs, mises bout à bout, apparaissent particulièrement violentes pour les élèves en question. Ces disqualifications quotidiennes conduisent à des pleurs, de la résignation et de la colère. Le mode de fonctionnement par classe stigmatise en effet dès la petite section les élèves ne maîtrisant pas ces pré-savoirs, les détournant ainsi du processus d’apprentissage. Les configurations pédagogiques font passer pour des qualités personnelles des enfants ce qui relève des cadres de vie et de socialisation. Les auteurs parlent à ce sujet de "transsubstantialisation symbolique" (p. 179), que les élèves s’approprient sous la forme de l’autocélébration ou de l’autodépréciation.

6 - Le chapitre IV est l’occasion d’importer dans le raisonnement les effets sur les performances scolaires de ces appropriations. Là où on "pouvait penser" que ce sentiment d’incompétence altère leur persévérance face à la tâche et leurs performances, les auteurs mobilisent quatre expérimentations au sein des classes, reprises à la tradition psychosociologique, pour le démontrer. Les deux premières expériences montrent que les élèves issus de milieux populaires (expérience 1) et les élèves qui n’ont pas eu le temps de s’approprier le nouveau savoir évalué (élèves "en situation d’apprentissage", expérience 2) voient leur performance se dégrader lorsque la performance des autres (les élèves plus favorisés socialement ou encore ceux qui ont eu le temps de s’approprier le savoir évalué) est rendue visible. La démonstration tient à la comparaison entre un groupe témoin devant répondre sur table et un groupe répondant à main levée. Pour l’expérience 3, un groupe d’élèves à qui les chercheurs ont expliqué que la meilleure performance des autres résulte d’un avantage de préparation est comparé aux élèves d’un groupe témoin : ils montrent que les premiers réussissent considérablement mieux que les seconds. Enfin, pour l’expérience 4, les chercheurs insistent auprès d’un groupe d’élèves sur le fait qu’il est "normal" de rencontrer des difficultés pour faire l’exercice : ce groupe est alors largement plus performant que le groupe témoin.

7 - Au terme de cette lecture, nous percevons tout l’intérêt d’ouvrir la boîte noire de ce qui se passe en classe pour comprendre pourquoi, alors que la lutte contre les inégalités sociales se présente comme une priorité, la reproduction et la légitimation des inégalités scolaires restent toujours aussi fortes. Même si nous aurions aimé plus de précisions méthodologiques sur les caractéristiques des enquêteurs (étaient-ils perçus comme des sociologues ou comme des psychologues ?) et sur la façon dont les caractéristiques sociales des élèves ont été récoltées puis intégrées à l’analyse (étaient-elles connues de l’enquêteur avant les observations et les entretiens ?), même si l’analyse gagnerait en finesse en prenant en compte les variations des pratiques d’enseignement en fonction des parcours sociaux et de la formation des enseignants (comme le précisent eux-mêmes les auteurs) et même si nous pouvons regretter l’absence d’écoles rurales dans le corpus ou encore la non prise en compte des différences de contextes sociodémographiques entre classes, nous ne pouvons que conseiller la lecture de cet ouvrage, au sein du monde académique certes, mais aussi et surtout aux futurs enseignants.

NOTES
1 Baril Bernstein, "Classes et pédagogies : visibles et invisibles", 1975, in Jérôme Deauvieau, Jean-Pierre Terrail (dir.), Les sociologues, l’école et la transmission des savoirs, Paris, La dispute, 2007.
2 Pierre Bourdieu et Monique de Saint-Martin, "Les catégories de l’entendement professoral", Actes de la recherche en sciences sociales, no 3, 1975, p. 68-93.
3 Guy Vincent, L’école primaire française. Étude sociologique, Lyon, Pul, 1980.
4 Bernard Lahire, "La construction d’un homme autonome : analyse des dispositifs scolaires", dans L'esprit sociologique, Paris, La Découverte, 2007, p. 322-347.
5 Stanislas Morel, La médicalisation de l’échec scolaire, Paris, La dispute, 2014.
6 Voir B. Bernstein, op. cit., mais aussi, pour un exemple au collège, l’excellent texte de Stéphane Bonnery, "La carte du relief en 6e. Colorier ou symboliser ?", 2011. Disponible en ligne
7 Voir Norbert Élias, La société des individus, Paris, Agora, 1987.
8 Pierre Bourdieu, "Le racisme de l’intelligence", Questions de sociologie, Paris, Minuit, 1980, p. 264-268.
9 Jean-Claude Coizet, "Le racisme de l’intelligence", in Fabricio Butera, Céline Buchs et Céline Darnon (dir.),L’évolution, une menace ?, Paris, Puf, 2011, p. 135-144.


L'assassinat des livres - Par ceux qui œuvrent à la dématérialisation du monde

L'assassinat des livres - Par ceux qui oeuvrent à la dématérialisation du monde
Couverture du livre

Editions L’Echappée - collection Frankenstein
Coordonné par Cédric Biagini
Recension : Dominique Grandpierre

Grandes lignes
Critique de la dématérialisation du livre et de la culture numérique par des libraires, bibliothécaires, éditeurs, auteurs, traducteurs, lecteurs...

Argumentaire
Cerné de toute part, le livre est sommé de rentrer dans l’ordre numérique.
Laboratoires du futur plus innovants que jamais, multinationales du web, géants de l’électronique, pouvoirs publics et techno-enthousiastes œuvrent de concert pour faire disparaître ce petit «cube de papier», qui fait figure de fossile à l’heure où la culture numérique s’impose partout. Bien que sa liquidation ne se fasse pas aussi vite que prévu - Le marché de l’e-book peinant à s’imposer en France -, Les acteurs de la chaine du livre sont de plus en plus fragilisés, même si certains croient pouvoir transférer leur métier dans un monde qui n’a pourtant pas besoin d’eux. Et ce, alors que les modes de lecture induits par le livre, au fondement de nos façons de penser et de nos manières d’être au monde, sont aujourd’hui en crise. Le livre, dans sa linéarité et sa finitude, dans sa matérialité et sa présence, constitue un espace silencieux qui met en échec le culte de la vitesse, permet de maintenir une cohérence au milieu du chaos. Point d’ancrage, objet d’inscription pour une pensée critique et articulée, hors des réseaux et des flux incessants d’informations et de sollicitations, il est peut-être l’un des derniers lieux de résistance. C’est ce que nous rappellent les libraires, bibliothécaires, éditeurs, auteurs, traducteurs et lecteurs, venus d’horizons divers, qui s’expriment dans cet ouvrage. Un peuple du livre, réfractaire aux illusions numériques, qui défend ce pourquoi il se bat au quotidien, à contrecourant des processus qui endommagent nos capacités de lecture, de contemplation, de réflexion, d’écoute et d’abandon esthétique, pourtant si nécessaires à la construction de soi et au bien-être collectif.

L’Assassinat des livres est avant tout un livre militant. Sa forte coloration politique pourrait gêner certains lecteurs, mais les richesses des articles, la pertinence des propos tenus, font de ce livre une réflexion passionnante et qui remet en cause certaines fausses évidences.
En coordonnant ce livre, Cédric Biagini, militant de l’Offensive libertaire et sociale et animateur des Editions de l’Echappée, souhaite "faire une critique de la marginalisation croissante du livre au sein de notre culture, et de la disparition du peuple du livre et du monde qu’il avait engendré". Il est d’ailleurs publié dans la collection "Frankenstein" qui s’est donnée comme objectif une critique de l’idéologie du progrès, et participe, à ce titre, au vaste courant des "technocritiques".

D'une construction rigoureuse et efficace, l'ouvrage, à travers les témoignages d'auteurs, d'éditeurs, de libraires et de bibliothécaires, témoigne des enjeux à la fois commerciaux, économiques, politiques et idéologiques de la dématérialisation du livre qui œuvre à la dématérialisation du monde. Chaque auteur d’article livre sa réflexion sur le sujet. Les contributions sont inégales, mais l'ensemble est tout à fait passionnant, et pertinent. Ces réflexions mettent en lumière comment, en mettant en péril la profession de libraire et celle d'éditeur, le livre numérique (et derrière lui de grands groupes comme Amazon, Google ou Apple) s'attaque à la diversité culturelle au profit de la mise en valeur de ce qui se vend, et uniquement de cela. Au fil des contributions, il devient également évident qu'il s'agit aussi d'une mutation des esprits, d'une transformation de la construction de la pensée et de la mémoire. Pour élaborer une pensée profonde, il faut du calme, du temps, se déconnecter des bruits de fonds pour se rendre capable d'écouter le monde. Et cela, il n'est pas du tout sûr que la lecture sur écran le permette, dans la mesure où elle induit des possibilités constantes d'interaction.

Le chapitre les auteurs reprend les déclarations de l'écrivain Milan Kundera qui interdit la publication de son œuvre sous format numérique ou celles de Mona Ozouf, Eric Chevillard, Jean-Luc Coudray ou Georges Steiner, tous revendiquant les possibilités "de silence, d'intimité et de recueillement, de patience, de solitude qui accompagnent le livre, aujourd'hui toutes en passe de disparaître".
Dans un texte admirable de poésie Christian Bobin écrit à propos de la lecture numérique et de celle du papier : "Je peux témoigner de ceci : le silence qui monte de ces deux façons de lire n’est pas le même. L’électronique englouti le visage. Le papier vient donner sa noblesse d’arbre et de chiffon aux mains qui le tiennent et, par ces mêmes mains, à l’âme qui s’étonne".

Les éditeurs qui ont apporté leur contribution à cet ouvrage sont tous des éditeurs militants. Ils ne publieront jamais d’abject e-books, certains préférerons fermer boutique plutôt que d’être obligé, un jour, d’écraser les livres dans la moulinette numérique, cette grande machine à atomiser et à décerveler. Ils souffrent de cette mutation : des textes, trop rapidement écrits, vite composés, mis en vente presque aussitôt, profilent un code étrange de masse - mévente, pilonnage, poubelles, accroissement de fonds peu mobiles dans le temps. Ils préfèrent "ces livres-livres, simples et debout, ces livres enracinés dans le temps réel, ces livres patients, fait d’encre, de papier et de rêves, enfin ; où le monde nous attend, murmure et se révèle".
Alors naufrage des livres-livres ? Suivons l’appel des éditions de L’échappée "souquez, moussaillons, souquez ferme. Et que vogue l’embarcation ! Car ni l’heure, ni le jour, ni le mois, ni l’année, ni même le siècle n’est venu de battre pavillon blanc."

Chez les libraires, on revendique le lieu de vie, de rencontre et d'échanges, le rôle de passeur, la circulation des livres et l'on déplore la perte de l'expérience sensible, "l'expérience du corps des livres", le lien social qui risque de disparaître avec le livre électronique, qui s'acquiert, par un clic et sans se déplacer.

Dans les bibliothèques, pour éviter la fracture numérique, les lecteurs sont formés à la maîtrise des nouveaux outils et le prêt de liseuse contribue finalement à éloigner les gens du lieu culturel ; ils apprennent à tout faire depuis chez eux, sur leur smartphone ou leur tablette.

Alberto Manguel réfléchit alors à la bibliothèque idéale, remonte à celle d'Alexandrie, à l'histoire de Babel et entraîne le lecteur, cette fois, dans une réflexion plus poétique et philosophique.

Les bibliothèques sont devenues des médiathèques et le contenu des bibliothèques a aussi été modifié, on n’en a pas seulement des livres, mais on a fait entrer dans les collections des choses qui n’y étaient pas jusqu’a présent : la musique, la vidéo, les jeux vidéo. Et les bibliothécaires deviennent des animateurs culturels qui ont pour mission de créer une ambiance, une atmosphère qui donne envie aux gens de venir, et qui va essayer de les ramener au livre parce qu’ils s’en sont éloignés ou risquent de le faire. La bibliothèque s’est éloignée de sa fonction qui est d’être le réceptacle du livre et l’accueil du lecteur autour du livre, ce qui s’est passé, c’est que les gens viennent en bibliothèque de moins en moins pour les livres. C’est ça le vrai paradoxe.

Le lecteur, avec la tablette, serait soumis à une lecture sans lecture. La technologie de l’hypertexte incite le lecteur à élaborer son propre "parcours de lecture" et empêche l’appropriation d’une œuvre, qui suppose une lecture continue. Nicolas Carre, témoigne : "Mon attention se relâche et ma lecture en profondeur, qui lui était naturelle, est devenue une lutte. J’ai aujourd’hui presque totalement perdu ma capacité à lire et à absorber un article un peu long, que ce soit en ligne ou sur papier." Des études, écrit-il, montrent que les lecteurs qui pratiquent la lecture linéaire comprennent mieux, se souviennent mieux et apprennent mieux que ceux qui lisent des textes farcis de liens. Les professionnels de l’éducation rencontrent des difficultés croissantes à fixer l’attention des enfants et des adolescents et à les inciter à se concentrer. Et l’on sait bien que l’attention est un processus indispensable à l’apprentissage. Un espoir tout de même, de plus en plus d’étudiants disent non merci aux manuels numériques.

Jusqu’à récemment le lecteur était le destinataire d’un contenu qu’on lui vendait dont il disposait ensuite à sa guise. La révolution numérique a industrialisé les pratiques de lecture et le lecteur est désormais le destinataire potentiel de publicités qui financent l’offre de lecture. Une firme a créé un logiciel de technologie d’écriture automatique. Le but de ce journalisme automatique est d’affiner la personnalisation des textes en fonction des centres d’intérêt, des habitudes de navigation et du niveau culturel de l’internaute, connus grâce aux collectes de données, afin de le pousser à passer le plus de temps possible sur un site et à y revenir. Ainsi Google a transformé les mots en marchandise et a réussi à étendre le capitalisme à un territoire que l’on aurait cru protégé, celui de la langue elle-même.
Est-il illusoire de lutter contre la lecture numérique ? Et qui peut dire si, tandis que la machine continuera de fuser sur la route glacée de ses métamorphoses, le livre ne demeurera pas jusqu’au bout, tel la tortue du paradoxe, son rival immobile et débonnaire.

Ce gros livre d’analyse peut paraître rébarbatif, mais une fois classé, annoté, post-ité, il devient un instrument de référence, à méditer, à feuilleter, à placer dans votre bibliothèque, après un petit passage chez votre libraire !

Foisonnant et précis, assurément nécessaire, ce livre à plusieurs voix, érudites et parfois un peu complexes, mériterait vraiment que la jeunesse s'en empare car c'est elle, forcément, qui décidera de l'avenir du livre. Mais, lorsque l'on sait que le smartphone est le premier terminal culturel des adolescents et jeunes adultes, il y a des raisons à l'inquiétude et une urgence à ne pas lâcher ce livre et à le transmettre.
Ajoutons que le volume est bien édité, et confirme que le confort de lecture du livre papier demeure très supérieur aux formes dématérialisées.
Un partage d’expérience pour gagner du temps et de la sérénité.


L'erreur de Broca : exploration d'un cerveau éveillé

L'erreur de Broca : exploration d'un cerveau éveillé de Hugues Duffau
Couverture du livre

Date de l'ouvrage : Mars 2016
Ecrit par Hugues DUFFAU avec la collaboration de Christophe DUCHATELET
Editions Michel LAFON - 2016
281 pages

L’argument pivot est de privilégier la compréhension d’un phénomène par l’identification des fonctions qu’assure ou que devrait assurer tout l’organisme plus que par la description analytique de tel organe qui aurait le monopole exclusif de l’exercice de telle fonction quelque soit le contexte. Puis de parier que bien des fonctions peuvent être assurées en contournant par d’autres détours que par l’activité de ce seul organe. C’est cette fascinante plasticité du cerveau, inextricable réseau de neurones dans son tissus de cellules gliales qui rend intelligible l’exercice de processus qui assurent les fonctions de l’esprit et de l’affect sans s’interdire aucun itinéraire possible. La complexité n’est-elle pas en attente de bricolage et de bricoleurs ?
Note de LE MOIGNE Jean-Louis (Mars 2016)

En publiant en 1994-1995 "L’Erreur de Descartes", Antonio Damasio nous invitait à être enfin attentifs aux aspects neurologiques de l'émotion et par là, à leurs implications dans l’exercice de la pensée et dans la manifestation du comportement personnel et social. Cette inversion du postulat du cogito cartésien, du 'je pense donc j’existe' au 'j’existe donc je pense' allait inciter quelques neurochirurgiens et quelques rares chercheurs en neuroscience à remettre sérieusement en question quelques dogmes simplificateurs de leur discipline, en particulier celui de la localisation cérébrale des principales fonctions attribuées au cerveau. Dogme symbolisé par la définition de "l’Aire de Broca", aire localisée avec précision dans le cerveau par le Dr Paul Broca à la fin du XIX° S., tenue pour être la région associée à la production de la parole. Broca introduisait ainsi la découpe localisationniste de nos représentations du cerveau qui allait orienter les recherches en neurologie dans une fausse direction pendant plus de cent cinquante ans. (p 15)

C’est dans ce contexte que le neurochirurgien - et musicien - narre son épopée scientifique et chirurgicale qui s’amorce pendant les années 90 de façon originale et très heureusement intéressante. En narrant ses dialogues avec quelques patients légitimement inquiets de se faire ouvrir le crane, Hugues Duffaut (avec la collaboration de Christophe Duchatelet) va décrire en des termes plausibles, l’activité du cerveau par des entrelacs de fibres s’enchevêtrant et autorisant d’innombrables itinéraires. Description qui suggère une forme d’intelligibilité des comportements multifonctionnels possibles (conscience, compréhension, émotion, ...)
"En connectant ces sous-réseaux entre eux, la fonction créative augmente considérablement nos facultés de perception et de compréhension, par un phénomène d’amplification et de potentialisation. Dans cette logique, si on admet que notre cerveau n’a cessé de se développer tout au long de son histoire grâce au pouvoir de la connectivité au point que nous sommes capables d'inventer des concepts à tout moment, alors on peut dire que la part de notre créativité demeure infinie, comme si notre imagination se déployait elle aussi à l'infini, élargissant sans cesse l’espace de notre conscience, de notre introspection et de notre improvisation." (p 229)
Il me faut ici reproduire la présentation de l’ouvrage proposée par l’éditeur pour dire l’essentiel de l’intrigue, laquelle sous la plume de H. Duffau va nous inviter à une méditation épistémologique particulièrement bienvenue aujourd’hui. On verra que les réflexions que suscite ce récit concernent tout citoyen attentif s’attachant à questionner les scientifiques sur la légitimité de leurs certitudes, pas seulement lorsque le chirurgien ouvre son crane pour explorer son cerveau.

Imaginez qu’on puisse vous opérer d’une tumeur au cerveau sans vous endormir, et qu’en affinant le geste médical on sauve non seulement votre vie mais toutes les capacités de cet organe... Imaginez qu’on puisse aller jusqu’à amputer votre cerveau de la zone du langage, la fameuse "aire de Broca", sans vous priver pour autant de la parole... Science-fiction ? En aucun cas. C’est ce qu’a prouvé le professeur Duffau qui, à ce jour, a opéré plus de six cents tumeurs cérébrales, sans séquelles. Décrié à ses débuts, il est aujourd’hui mondialement reconnu et consulté pour sa technique spectaculaire. Après une lutte acharnée pour rompre avec les dogmes encore en vigueur, il a révolutionné la neurologie et mis fin à une croyance erronée vieille de cent cinquante ans. En effet, le cerveau n’est pas divisé en zones indépendantes comme on le croyait, mais organisé en réseaux interactifs et doté d’une étonnante plasticité. Il est donc capable de s’adapter ou de se remodeler en permanence, offrant aux patients une récupération et une qualité de vie qu’on imaginait jusqu’ici impossibles ». (Le seul complément que j’ajouterai volontiers à ce résumé sera de préciser que le cerveau n’est pas seulement organisé - mais aussi s’organisant - en réseaux interactifs.)
L’argument pivot est de privilégier la compréhension d’un phénomène par l’identification des fonctions qu’assure ou que devrait assurer tout l’organisme plus que par la description analytique de tel organe qui aurait le monopole exclusif de l’exercice de telle fonction quelque soit le contexte. Puis de parier que bien des fonctions peuvent être assurées en contournant par d’autres détours que par l’activité de ce seul organe.
C’est cette fascinante plasticité du cerveau, inextricable réseau de neurones dans son tissus de cellules gliales rend intelligible l’exercice de processus qui assurent les fonctions de l’esprit et de l’affect sans s’interdire aucun itinéraire possible. La complexité n’est-elle pas en attente de bricolage et de bricoleurs, interrogeait déjà Y Barel ?

La portée épistémologique de cette modélisation systémique de l’activité cérébrale empiriquement ou cliniquement illustrée ne doit-elle pas être alors soulignée ? En achevant cet essai, j’ai eu envie de ré ouvrir 'La Musique de la Vie' (2006) de Denis Noble d’un des pères de la biologie systémique : entre le biologiste et le neurologue, l’un et l’autre musicien, l’un et l’autre ne sont-ils pas attentifs à la plasticité fonctionnelle des systèmes vivants ? J’ai choisi d’intituler ce livre 'La Musique de la Vie' écrivait D Noble. car la musique aussi est un processus et non un objet’ (p.231.) La métaphore n’est elle pas magnifique ? Je ne sais si H Duffau l’acceptera pour éclairer l’interprétation de la plasticité cérébrale qu’il nous propose de façon si convaincante, mais ses pages sur ‘Le Déclic en Musique’ (chapitre 4) – La musique fait appel à l’interprétation à l’instar de la comédie où l’acteur donne vie – invitera je crois ses lecteurs à se l’approprier.
voir le site intelligence-complexite.org

Paul Broca, s’est-il fourvoyé ? Par Denis Monod-Broca

Paul Broca est l'un des fondateurs de l'AFAS, association française pour l’avancement des sciences. Et il est l'aïeul de Denis Monod-Broca, auteur de ces lignes. Cela fait deux raisons particulières de lire L'erreur de Broca et deux raisons particulières de s'efforcer plus que jamais à l'objectivité.
Le livre du professeur Hugues Duffau, neurochirurgien, se présente et se lit comme un témoignage autobiographique plus que comme un livre véritablement scientifique.
La spécialité du professeur Duffau est l'ablation, de façon préventive, de tumeurs du cerveau du type "gliome bénin" à des patients bien-portants et surtout à des patients qui sont éveillés pendant l'opération. Il les fait participer à leur opération. Le mode opératoire est le suivant : le patient est endormi pour l'ouverture de la boîte crânienne ; le cerveau étant insensible à la douleur, le patient est ensuite réveillé, et le chirurgien entreprend alors de solliciter par un courant électrique les fibres et connexions de son cerveau, délicatement, point après point, et l'opéré, par ses réactions, sous le regard et la surveillance d'un orthophoniste, d'un psychologue, d'un neurologue ou d'autres spécialistes, montre si ses fonctions cérébrales sont ou non altérées par ces impulsions électriques. Ainsi, au fur et à mesure, le chirurgien peut-il "cartographier" le cerveau qu'il opère et déterminer les parties atteintes qu'il peut sectionner et les parties auxquelles il ne doit pas toucher. Par ce procédé, le professeur Duffau peut enlever jusqu'à 95%, parfois plus, de la tumeur. La technique existait depuis quelque temps, par exemple en cas d'épilepsie ; il l'a remarquablement développée. Elle permet aux patients opérés d'échapper au risque de la transformation de leur tumeur bénigne en tumeur maligne. Elle est considérée comme très prometteuse.

L'opinion qu'exprime le titre du livre, et qui est répétée tout au long de l'ouvrage, est que Paul Broca s'est fourvoyé avec son "localisationnisme", que les neurologues depuis 150 ans, suivant aveuglément Broca, se fourvoient comme lui, et que lui Duffau, grâce à la théorie qu'il nomme "connexionnisme", montre enfin le vrai chemin.
Là, il est difficile de le suivre.
La méthode scientifique, depuis Anaximandre, commande à la fois, aussi paradoxal que cela soit, et de s'appuyer sur les œuvres de ceux qui vous ont précédé et de les remettre en cause. Or Hugues Duffau, loin de s'appuyer sur l'œuvre de Broca, donne l'impression d'avoir besoin de se justifier au contraire par son rejet, en bloc. Alors même que sa technique de "cartographie du cerveau" prolonge l'hypothèse de Paul Broca plus qu'elle ne la contredit. Broca sut se pencher sur le fonctionnement du cerveau. Le sujet avait alors encore quelque chose de sacré, de tabou. On n'en savait à peu près rien. Son hypothèse de la localisation cérébrale a ouvert la voie. Il est curieux de nier cet apport. Même si ce qu'on sait aujourd'hui s'est considérablement développé et bien sûr diffère grandement de ce qu'il a décrit il y a 150 ans. Notamment, et Hugues Duffau y revient longuement, quant à l'unicité de chaque cerveau, et quant à l'extraordinaire plasticité de cet extraordinaire organe, capable de s'adapter, au gré des circonstances et des obstacles, de déplacer ses connexions, d'en créer de nouvelles, etc.
Le sujet, le cerveau, est passionnant. Cette technique à opéré éveillé est impressionnante. Le livre est passionnant et impressionnant, malgré son titre provocateur.
voir le site afas.fr


La fin de l'éducation ? Commencements...

L'instant présent de Jean-Pierre Lepri
Couverture du livre

La fin de l'éducation ? Commencements... - Jean-Pierre Lepri - L'Instant Présent

Avec ce titre énigmatique et quelque peu provocateur : "La fin de l'éducation ? Commencements..." Jean Pierre Lepri rompt, par le ton et par le sujet traité, avec toute la littérature publiée ces derniers temps sur l'éducation. Pur produit conforme au système "dominant-soumis" qu'il est bien placé pour mettre à nu, Jean Pierre Lepri docteur en éducation et en sociologie a exercé les fonctions d'instituteur, de formateur d’enseignants, d'inspecteur et d’expert international. Il appartient à un cercle de réflexion pour une éducation authentique (CREA-Apprendre la vie).

Son livre inclassable et iconoclaste subtilement illustré par DuBouillon débute par une préface d'André Stern, auteur de "Et je ne suis jamais allé à l’école", publié par Actes Sud, Zoé Neill (petite-fille du fondateur de Summerhill, A.S. Neill) signe la postface. Une première partie intitulée première fin de l'éducation analyse les finalités affichées de l'éducation confrontées aux finalités réelles. Le lecteur trouvera un grand intérêt à lire les réponses à la question posée à un groupe d'étudiants en sciences de l'éducation, à l'occasion d'une recherche sur le curriculum caché : «"Qu'ai je appris à l'école sans qu'on me l'ait ouvertement enseigné ?", ainsi que la liste des finalités observées par l'auteur lui même. On relève des distorsions impressionnantes entre les intentions officielles et la réalité observée constituée de connaissances et d'attitudes implicites. A l'école on apprend bien autre chose que ce qui figure dans les objectifs généraux des programmes : l’espace contraint, le modèle du bon élève auquel il faut se conformer coûte que coûte, la dépendance, la peur, la dépossession de la maîtrise de soi même...

Le chapitre suivant (seconde fin au sens de disparition) de l'éducation analyse, au plan juridico moral, relationnel, social et humain la relation éducative. "Le schéma inégalitaire, hiérarchique, caché, parfois même nié, inhérent à toute éducation constitue le fond du problème". Avec le dernier chapitre vivre sans éducation, on mesure la difficulté de décrire, ici et maintenant, cette "éducation" authentique que l’auteur appelle de ses vœux. Le chapitre est, en fait, un vibrant plaidoyer pour les apprentissages diversifiés et marquants qui s’effectuent sans enseignement : "apprendre c’est vivre et inversement". Il développe les conditions auxquelles les capacités d'apprentissage naturelles se développent en dehors de l'école. Quant aux commencements, ils n'occupent que huit petites pages, preuve qu'il n'est pas facile de penser une alternative à l'éducation.

Les encadrés : "De la conscience, Du besoin, De l'enseignement, De la vie, Du changement, Du juste" sont conçus comme des outils intellectuels censés éclairés certains concepts clefs développés par Jean Pierre Lepri. Ils éloignent parfois du texte de base qui est avant tout le récit d’un changement, d'une transformation intérieure d'un homme qui a consacré un demi-siècle au service de l'éducation et qui reconnaît avoir pu se tromper.

La profusion du paratexte est à l'image de la complexité d'une pensée qui ne peut se satisfaire de la linéarité, en témoignent les différentes formes d'écrits qui accompagnent le cœur du texte : bibliographie sélective, références nombreuses en bas de page, postface, remerciements, renvois à des articles disponibles sur internet et en annexe référence au site éducation authentique sur lequel on peut trouver une bande annonce du livre.

L'auteur possède une grande culture, il a énormément lu, les citations en cascade, les notes en bas de page abondent et donnent parfois le tournis. Il manie le paradoxe avec une grande dextérité, certaines formules se rapprochent du slogan : "l'échec de l'école est une réussite", "l’éducation, personne n'y échappe, très peu en réchappent". Il pratique un remue méninge permanent d'où finit par émerger une pensée réflexive originale qui se veut une réponse aux questions suivantes :

  • Quelle fin (quelle disparition) prévisible pour l’éducation ? Alors, vivre sans éducation ?
  • Moins bien ? Mieux ? Pourquoi ? Comment ?

Il faut bien avouer qu'à toutes ces questions pertinentes dont les réponses appellent un programme ambitieux, le lecteur n'entrevoit que les prémices sous la forme d’écoles hors les murs et d’écoles alternatives, les bonnes intentions de ces modèles se substituant aux propositions concrètes et mobilisatrices en rupture avec l’école capitaliste d’aujourd’hui.

Si à la lecture du livre, des points de convergences peuvent se faire jour avec les conceptions que développent l'A.F.L. notamment quant au diagnostic réalisé sur le fonctionnement de l'institution scolaire, les limites des réformes ("on re-forme, on ne touche pas le fond" des refondations, des améliorations, des innovations qui ne remettent pas en question le système dominant-soumis), en revanche les solutions de rupture proposées apparaissent encore floues et imprécises et s'éloignent quelque peu du projet de l'A.F.L. : à savoir "La transformation de l'école pour en faire un lieu de résistance permanente qui ne sépare pas la production des savoirs de l'implication dans la production d'un autre état". La vision de Jean Pierre Lepri doit beaucoup à celle d'Yvan Illich et à celle de John Holt, pédagogue, fondateur de la revue "Grandir sans école". Il ne s'agit pas, pour lui, de préconiser une énième éducation alternative mais de concevoir une société sans école et sans éducation par l'"éducation" authentique qui est l'alternative à l'éducation et dont les réseaux d’échanges réciproques de savoirs pourraient constituent un exemple concret.

Jean Marie kroczek

PS : à consulter, cette vidéo : Cheminement d'un enseignant.


Professeur des écoles débutant : la classe, mode d'emploi

La classe : mode d'emploi
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Professeur des écoles débutant : la classe, mode d'emploi - Serge Herreman, Jannick Caillabet, René Étrillard, Patrick Ghrenassia et Kathy Similowski - Hachette

Cet ouvrage destiné aux professeurs des écoles débutants offre des réponses immédiates aux questions liées à l'entrée dans le métier : préparation de la rentrée, gestion du groupe classe, organisation des apprentissages, travail en équipe, relation avec les parents, etc.

Il aborde concrètement et clairement tous les aspects fondamentaux de la profession, les illustre d'exemples de situations rencontrées "sur le vif" et auxquelles sont proposées des réponses adaptées, et précise les principaux textes réglementaires qui les régissent.

Un cédérom regroupe différents exemples et outils propres aux notions abordées (exemples de progressions, de fiches de préparation, de modèle de correction, de fiche de conduite de réunion avec les parents, etc.).


Deux défis pour écrire

Ecrire en toutes disciplines
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Ecrire en toutes disciplines : de l'apprentissage à la création (cycle 3) - Yves Béal, Martine Lacour, Frédérique Maiaux - Bordas pédagogie

Dans cet ouvrage deux défis sur un temps très court : deux défis pour écrire.

L'idée du "défi" se trouve explicité ici, en principe cela s'applique à la rentrée mais la démarche est tout à fait utilisable dans le cadre d'un remplacement.

Le premier défi est un atelier d'écriture de poésies en 3 jours : prévoir des poèmes (un peu plus que d'élèves), il est préférable de choisir des textes riches en métaphores claquantes et en oxymores clinquants. Ces poèmes seront imprimée ou photocopiés pour affichage au tableau.

Le deuxième défi est la rédaction d'un journal en 1 jour (impression comprise !)


Stratégies pour lire au quotidien de la Gs au Cm2 : apprendre à inférer

Stratégies pour lire au quotidien de la GS au CM2 : apprendre à inférer
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Stratégies pour lire au quotidien de la GS au CM2 : apprendre à inférer - Annie Gorzegno, Claude Legrand, Patrick Virely - Scerén

Ces activités présentent de nombreux avantages pour un remplacement même court : elles font appel à la réflexion, elles nécessitent peu de préparation matériel (rien pour les GS et les CP, des photocopies éventuellement réutilisables pour les autres niveaux), la correction est immédiate.

Il semble que les enseignants posent 5 fois plus de questions littérales que de questions inférentielles, nous pouvons tenter de rééquilbrer un peu.

Certes la programmation est composée de 10 séances et il ne sera sans doute pas possible de les réaliser toutes.

Démarche à suivre

On identifie 10 types d'infèrences (je ne vous ferais pas l'injure de vous rappeler ce qu'est une inférence, vous chercherez dans le dictionnaire) : lieu, agent, temps, action, instrument, catégorie, objet, cause, effet, problème, solution et enfin sentiment. Chacune fera l'objet d'une ou plusieurs séances.

Puis on décompose comme suit les tâches nécessaires à l'inférence : découvrir les indices dans le texte, faire des hypothèses à partir de ces indices, choisir parmi ces hypothèses celle qu'on peut justifier par tous les indices. Ces différentes tâches seront réparties entre élèves et enseignant sur 5 exercices de façon immuable de séance en séance.

EnseignantElève
1ère partieQui met les indices en évidences ?X
Qui effectue l'inférence ?X
Qui justifie l'inférence ?X
2ème partieQui met les indices en évidences ?X
Qui effectue l'inférence ?X
Qui justifie l'inférence ?X
3ème partieQui met les indices en évidences ?X
Qui effectue l'inférence ?X
Qui justifie l'inférence ?X
4ème partieQui met les indices en évidences ?X
Qui effectue l'inférence ?X
Qui justifie l'inférence ?X
5ème partieQui met les indices en évidences ?X
Qui effectue l'inférence ?X
Qui justifie l'inférence ?X

Un exemple sera plus clair :

Niveau CE2 : séance 4 "ACTION" exercice n°2

L'enseignant à expliqué que le but de la séance est de retrouver ce que fait une personne ou un animal dont on parle dans le texte.
Les élèves ont tous les textes sur la table mais ils les découvrent au fur et à mesure (les exercices 3,4, et 5 sont cachés par une feuille).

M. Dorey franchit la porte de ma chambre, sa sacoche à la main. Il m'impressionne un peu avec son air sévère et ses petites lunettes carrées.
"Ouvre la bouche, tire la langue ! En effet, la gorge est bien rouge !" dit M. Dorey.
Que fait M. Dorey ?

L'enseignant met en évidence les indices
Ma chambre, sacoche, air sévère, petites lunettes carrées, tire la langue, la gorge est rouge...

Les élèves effectuent l'inférence
Accepter toute réponse correspondant à un indice.

L'enseignant justifie l'inférence
S'il observe la gorge, M. Dorey n'est pas un dentiste mais sans doute un médecin qui ausculte un enfant (il le tutoie, il tient une sacoche dans la main, il a l'air sévère, il porte de petites lunettes carrées).

Pour chaque niveau il y a 10 séances de 5 exercices.

J'ai commencé à scanner les textes sous une forme plus utilisable mais je ne pense pas pouvoir les mettre à disposition pour des raisons de droits d'auteurs.

Sylvie Baudouin

Aider l'enfant en difficulté scolaire

Aider l'enfant en difficulté scolaire
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Aider l'enfant en difficulté scolaire - Jeanne Siaud-Facchin - Odile Jacob

"Ses résultats sont catastrophiques", "Il n'est pas motivé", "Il ne tient pas en place, son travail est toujours bâclé", "Il travaille du mieux qu'il peut, il s'applique et pourtant ses résultats sont mauvais"...

Troubles de l'attention, de la mémoire, du raisonnement, mal-être, manque de confiance en soi, problème affectif envahissant sont autant de causes possibles de l'échec scolaire.

Pour aider efficacement votre enfant, il est essentiel de bien comprendre l'origine de ses difficultés d'apprentissage.

Quand s'inquiéter ? Quand consulter ? Quelle est la prise en charge adaptée ? Ce livre vous propose des conseils concrets pour agir efficacement.
Pour permettre à votre enfant de retrouver le plaisir d'apprendre et de s'épanouir à l'école.


Anthologie des textes clés en pédagogie : des idées pour enseigner

Anthologie des textes clés en pédagogie : des idées pour enseigner
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Anthologie des textes clés en pédagogie : des idées pour enseigner - Danielle Alexandre - Esf

Puisant parmi les auteurs les plus réputés en pédagogie, ce livre reprend des extraits de leurs ouvrages pour constituer une anthologie de textes sélectionnés à partir des collections "Pédagogies" et "Pratiques et enjeux pédagogiques".

Perrenoud, Astolfi, Meirieu, Peretti, Houssaye, Develay, Hameline, et bien d'autres, ont marqué l'histoire de la pédagogie ces trente dernières années.

Réunir des textes fondateurs mais aussi faire découvrir ou redécouvrir des textes moins connus, faire entendre d'autres auteurs, tel est le parti pris de cet ouvrage.
Ainsi, au moyen de ce livre, étudiants et débutants pourront entrer dans cet univers foisonnant qu'il faut absolument connaître pour réussir les examens et les concours.
Cette anthologie s'adresse également aux enseignants désireux de se former et fournit à chacun un florilège de textes pour nourrir la réflexion.

Les extraits sélectionnés sont classés par mots-clés et éclairés systématiquement par les commentaires de Danielle Alexandre.
Elle replace ces textes fondateurs dans leur contexte historique, restitue les débats ambiants et souligne la pertinence, l'importance de ces travaux et leur modernité.

Grâce à ce livre, le lecteur pourra lire Astolfi sur le rôle de l'erreur, Perrenoud sur les compétences ou la différenciation, Meirieu sur la relation pédagogique, Peretti sur l'évaluation, Houssaye et le fameux triangle pédagogique, Hameline et les objectifs pédagogiques...
Chacun pourra ainsi revenir aux sources.

On retrouvera tous ces auteurs et bien d'autres tout aussi importants au fil de ces pages ainsi que dans une présentation détaillée en fin d'ouvrage.